Le printemps
Après les longs mois sombres et froids, les jours se rallongent enfin et les températures deviennent un peu plus douces. Les premières plantes vernales commencent à sortir avec leurs fleurs chatoyantes et les oiseaux vos offrent leurs chœurs matinaux. Ceci peut arriver bien avant le 21 mars, jour de l’équinoxe du printemps mais néanmoins il vous invitent à les rejoindre dans la nature. Alors, si même le soleil pointe son nez, n’hésitez pas à les rejoindre. C’est le moment idéal pour libérer vos petons et de savourer cette nature renaissante.
Autant que cela vous semble alléchant vous allez me dire qu’il fait trop froid, que c’est dangereux, que ça va faire mal, qu’il y a des bébêtes et mille autres choses. La réalité est pourtant bien différente et c’est très agréable de se sentir partie intégrante de cette nature, de l’apprécier et de la respecter.
L’idée qu’il fait encore trop froid en cette saison pour sortir les pieds à l’air est fausse, par 8 à 10 °C on peut très bien se balader dans la nature les pieds nus pendant plusieurs heures. Il suffit de s’habiller en conséquence. Même avec des chaussures vous ne vous promenez pas non plus en maillot de bain en cette saison. Optez plutôt pour ce qu’on appelle communément la technique de l’oignon. Mettez plusieurs couches fines et veillez à ne pas mettre des vêtements serrant. Il faut que l’air puisse circuler. L’avantage de ce système réside dans le fait que si vous avez trop chaud vous pouvez éplucher une couche. Ainsi vous gardez la température corporelle à niveau et en marchant vous activez la circulation sanguine dans vos pieds et vous évitez d’avoir froid aux pieds.
Maintenant que le roi hiver est reparti, les feuilles mortes se sont majoritairement décomposées et les sentiers sont tout mous. En cette période de l’année, comme la végétation n’est pas encore envahissante, les sentiers sont bien visibles aussi, ce qui facilite de voir où on dépose le pied pour marcher avec plus de confiance. Avec un peu de chance vous allez encore trouver un peu de neige fondante sous le soleil qui vous procure une sensation de marcher dans de la ouate, il faut en profiter avant qu’elle ne disparaisse jusqu’à l’hiver prochain. Finalement, il faut bien se dire que si vous commencez à marcher pieds nus pour la première fois au début du printemps vous aurez plus de temps pour conditionner vos pieds avant les premières fraîcheurs de l’automne.
Aussi vrai que sont ces avantages de commencer tôt dans l’année, ceci ne veut pas dire que si vous lisez ces lignes avec intérêt en été ou à la fin de celui-ci que vous devez attendre impatiemment pendant six ou huit long mois pour apprécier les joies de la randonnée pieds nus. Tant que les températures ne sont pas trop froides et que de préférence il y a un peu de soleil pour vous accompagner vous pouvez commencer en toute confiance.
Les sentiers forestiers sont le meilleur terrain de jeu pour les novices, car ils sont très agréables au toucher de la plante du pied, pour autant que les services forestiers n’ont pas réparés l’érosion avec du gros gravier d’un calibre de ballast de chemin de fer, ce qui est malheureusement le cas dans certaines régions. Les chemins forestiers ne sont cependant pas une nécessité, une balade à travers champs et prairies peut être aussi agréable. Mais si vous avez le choix optez plutôt pour les sentiers forestiers car ils procurent un meilleur exercice d’entraînement pour les pieds.
La première règle, et la plus importante, de sécurité est : DÉPOSEZ TOUJOURS VOTRE PIED A LA VERTICALE ! NE SHOOTEZ JAMAIS AVEC LES PIEDS NUS ET NE TRAÎNEZ JAMAIS LES PIEDS PAR TERRE. C’est plus important que toutes les autres règles confondus et c’est plus important que tout ce que vous allez lire plus loin dans ce livre. Ceci peut sembler un effort considérable au début et vous allez probablement devoir désapprendre certaines mauvaises habitudes de marche. La marche d’un randonneur pieds nus est légère, douce et sensible, souvent inquisitive et tentative. Si vous apprenez cette seule règle, même si vous n’apprenez rien d’autre, vous avez déjà éliminé 99% des risques que n’importe quel sentier peut présenter aux pieds nus.
La seconde règle pour le randonneur pieds nus est : Regardez toujours le chemin devant vous. Ceci peut sembler clair comme de l’eau de roche mais ça peut aussi être douloureusement facile à oublier. Si vous voulez regarder quelque chose, une plante, un paysage… arrêtez vous. Tant que vos pieds sont en mouvement vos yeux doivent suivre le mouvement et scruter le sentier devant vous. Ceci ne veut pas dire non plus que vous deviez regarder que vos pieds, il y a tant d’autres belles choses à voir, regardez plutôt à deux ou trois mètres devant vous en scannant le sol et n’oubliez pas de profiter de l’endroit.
Apprenez à repérer l’endroit où vous allez poser le pied et imaginez vous ce que vous allez sentir quand vous allez déposer le pied dessus. Cette pratique deviendra assez importante quand vous allez vous aventurer sur un terrain plus accidenté ou rocailleux. Essayez le, dés le premier jour, même si le sentier que vous empruntez vous semble être mou comme du beurre salé breton. Aussi fastidieux que ça peut vous sembler en le lisant, dans la pratique cela devient très vite un automatisme, mais ça vous apprend à coordonner le sens de la vue et le sens tactile que vous venez de découvrir sous vos pieds.
Une autre habitude à prendre est de garder votre poids plus sur l’avant pied que sur le talon, ceci ne veut pas dire que vous devez marcher que sur l’avant pied comme si portiez des haut talons. De toute façon cela deviendrait très vite, très fatiguant. Dans certaines conditions vous aller vouloir marcher comme ça mais on y reviendra.
Retournons à l’important sujet de la sensitivité et de l’attention. N’oubliez pas que vous marchez pieds nus et prêtez toujours attention à vos pieds. J’ai déjà dit que la marche du randonneur pieds nus est douce, souple et légère mais il y a des situations où votre attention va vous indiquer de retirer le pied au lieu de le poser car ce que vous sentez en dessous ne vous plait pas. A des moments pareil il ne faut pas hésiter de retirer le pied et de trouver un autre point d’appui. Très vite cette vigilance devient part du subconscient et devient tout à fait naturelle.
Quand vous entamez votre première balade vous devriez marcher lentement et sentir comment vos pieds épousent le terrain. Si vous avez l’occasion de faire la balade avec un ami essayez de marcher quelques mètres les yeux fermés en vous laissant guider, en silence, par la main de votre ami. Votre seule attention est sur vos pieds et le sol qui se trouve en dessous. Si vous êtes tout seul vous pouvez le faire aussi mais la faites le trajet en étudiant bien le chemin, puis revenez sur vos pas et essayez de le faire les yeux fermés. Il est évident que cet exercice se fait sur un terrain facile et sans obstacles.
Essayez de marcher sur et sentir autant de surfaces différentes que possible, de la terre, du sable, de l’herbe de la mousse… et n’évitez pas sauf peut-être dans les premières heures des surfaces plus texturés comme du gravier. Il faut apprendre que de tels surfaces, malgré que parfois un peu désagréable, ne font pas mal aux pieds, c’est dans votre cerveau que vous avez mal et il faut entraîner le cerveau à faire la différence entre cette sensation et celle de quelque chose qui pourrait vous blesser car vous dépendez de la sensibilité de la plante de votre pied. Vous devriez essayer de marcher ainsi au moins une fois par semaine (deux ou trois fois serait mieux) et d’être pieds nus le plus possible.
En descente prenez l’avantage de toute la plante de votre pied et vos orteils pour éviter de glisser, surtout sur un terrain très mou, choisissez vos points d’appui consciencieusement comme vous le feriez pour des racines ou des rochers. Profitez du fait que vous êtes pieds nus, c’est plus facile qu’avec des chaussures.
Pendant que vos pieds et vos jambes s’adaptent à la randonnée pieds nus vous pouvez sentir certaines sensations, courbatures, surtout s’ils sont assez prononcés, qui peuvent être déconcertants pour ceux qui n’y sont pas préparés. Si vous n’avez jamais fait de la randonnée et commencez avec plus de 4 à 5 km, surtout s’il y a une bonne portion en descente, il est presque certain vous allez sentir une certaine douleur dans les pieds et plus que probablement des courbatures dans les mollets. Ceci commence en général 3 à 4 heures après l’effort et dure généralement pas plus d’une journée. C’est le résultat naturel d’utiliser des muscles et des tendons dont probablement vous ignoriez l’existence. Tant que ces maux se résorbent dans les 24 heures ils sont un signe d’un bon exercice sain ; et si vous remettez ça deux ou trois jours plus tard ces petits maux se limiterons déjà à la moitié. Si ça ne disparaît pas aussi vite ou que vous avez des beaux bleus, alors c’est un signe que vous avez bien exagéré sur la distance et la difficulté. Si c’est ainsi prenez du repos et recommencez à un niveau plus facile et moins long. Je sais il est très facile de faire trop et trop vite, tellement la marche pieds nus est agréable, qu’au printemps, malgré mes plus de 35 ans d’expérience je m’y fais prendre presque chaque année. Un autre phénomène que vous pouvez subir de temps en temps c’est un léger chatouillement dans la plante du pied. Ceci est le résultat de la croissance et épaississement de la peau après stimulation. Ceci s’arrête après quelques semaines quand votre cuir vivant a retrouvé son épaisseur naturelle.
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Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas. Lao Tseu